El cavallino rampante : Per sempre ! Toute une histoire !

le 18 mai

Bonjour à toutes et tous,

Un petit sujet tout autre que la saga des petites et moyennes délicieuses série de la fin des sixties, à savoir l'origine de notre logo cher au coeur.

Même si l'histoire est hyper connue, je vais essayer d'en dresser toute la symbolique et ses différentes pérégrinations, pas forcément connues.

En fait, comme vous le savez, tout commence avec l'exploit de Francesco Baracca, as de guerre de la naissante armée de l'air italienne, qui, un beau jour de 1916, a abattu à lui seul cinq avions allemands* au-dessus de la ville de Stuttgart, ''capitale'' de la 'Basse-Saxe'' (région devenue depuis le länder du Bade-Wurtemberg).

Or, le symbole de la Basse-Saxe est un cheval cabré, motif héraldique de la dynastie des Guelfes ou de la Westphalie. Il représente le peuple saxon, l’ancien duché de Saxe

L’écusson de la Basse-Saxe, et plus particulièrement de la « Westphalie », est composé d’un cheval blanc, en plein saut, sur fond rouge. Dès son apparition au XIV^e siècle, il a été considéré plutôt comme un symbole populaire, régional que comme le signe d’un règne dynastique, c’est-à-dire plutôt un symbole du pays et de son peuple que de la famille souveraine des Guelfes. C’est ce qui fait sa popularité qui s’exprime encore aujourd’hui comme symbole de la ville, symbole qui associé aux bandes rouges et noires du land de Bade-Wurtemberg et aux ramures stylisées de l'ancien Land de Württemberg-Hohenzollern constitue le logo d'une autre célèbre officine de voiture de sport contemporaine ** Le cheval de Saxe comme symbole du Land de Basse-Saxe

Bref, pour rappeler cet exploit, Baracca reprend le cheval cabré, symbole de l'ennemi, un peu comme certaines peuplades dans les siècles précédents se faisaient tatouer les ''armoiries'' ou plutôt les symboles d'arme de la tribu ennemie, une fois celle-ci vaincue.

Il le fit peindre en noir sur fond blanc ressortant mieux sur la carlingue écarlate de son bi-plan.

A la mort de leur fils à la tout fin de la guerre, lors d'un combat aérien fatal, le comte et la comtesse Barraca - Francesco était le fils d'une grande famille de l'Emilie-Romagne, en rajoutant à sa légende - conserva le Cheval cabré ébène comme symbole de la bravoure de leur héros de fils.

C'est 5 ans plus tard, en 1923, à l'occasion du Grand Prix de Savio qu'Enzo Ferrari remporte (c'est sa première victoire significative) que ce dernier fait connaissance du comte Enrico Baracca, père de l'aviateur, à l'occasion notamment de la remise des lauriers au vainqueur.

Enzo qui connaissait la renommée du célèbre aviateur est impressionné par ce premier contact. De son côté, Enrico Baracca reconnait dans la détermination et l'opiniâtreté du jeune Enzo des qualités lui rappelant son fils adulé.

De fait, les deux hommes développent rapidement une amitié durable. Enzo est souvent l'invité des Baracca. Et huit années plus tard, la comtesse Paolina Biancoli, mère de Francesco, en signe d'amitié et de reconnaissance demande à Enzo de prendre le ''talisman'' de son fils comme blason pour sa toute nouvelle écurie, la ''Scuderia''.

Enzo, particulièrement ému, accepte évidemment cette requête; au-delà de l'insigne honneur qui lui est fait, il y voit comme la perpétuation d'une gloire nationale. Et c'est en 1932 à Spa Francorchamps qu'apparaît sur le capot des Alfa-Rome 8C 2300 de la Scuderia le célèbre Cavallino Rampante.

Auparavant Enzo avait demandé à Gino Croari, jeune peintre en plein essor (il avait alors 27 ans) de redessiner le pur-sang cabré en utilisant comme fond le célèbre jaune de la ville natale du Commendatore, symbole des blés entourant la ville alors qu'elle était la prospère capitale de l'Emilie-Romagne, le tout surmonté du relativement jeune bandeau tricolore vert banc rouge de la jeune Italie***

Dèslors, victoires-aidant, Enzo adopta définitivement le cavalino rampante pour en faire son propre emblème, tout à la joie des Baracca qui y voyait comme une perpétuation de la gloire de leur fils.

Suite à la rupture de Ferrari avec Alfa, ce premier conserva naturellement son ''totem''.

Pendant la seconde guerre mondiale, il n'en fit naturellement pas usage, ne confondant pas affaires (Enzo continua à prospérer en fabriquant des machine-outils sous licence allemande) et passion.

Ce n'est donc qu'en 1947, avec la sortie de la 125S que le cavallino rampante devint officiellement associé à Ferrari.

Enzo recourt alors à un célèbre sculpteur de Milan, Eligio Gerosa, pour perfectionner l'aspect initial du cheval et en faire une véritable sculpture, même en dessin, un peu comme l'anticipation du 3D, et notamment par un jeu d'ombre et de lumière sur le corps du fier destrier.

Le fait est que Gerosa, grand admirateur de Francesco Baracca, avait déjà travaillé sur le symbole. Enzo, très impliqué, rend souvent visite à Gérosa et lui fit reprendre nombreux détails, le plus important étant l'orientation du destrier, tête vers la gauche, pour symboliser la marche en avant de ces propres bolides ''A pieno ritmo come sempre''****

Entre temps, l'entreprise de Gerosa avait été racheté par Emilio Candini, ce qui ne changea par les bonnes relations avec le commendatore.

Plus tard, Candini, honoré comme Enzo du titre de ''Cavaliere'', l'équivalent de chevalier de la légion d'honneur, a, lors de son discours de reconnaissance, cité sa contribution au plus célèbre des logos du monde comme une de ses plus grandes fiertés. On ne peut qu'imaginer la félicité d'Enzo à l'écoute de ces louanges.

Les deux hommes ont continué à travaillé ensemble pour ''parachever'' le logo, l'écusson adoptant au cours des années 70 des lignes droites, rectangulaires au lieu des lignes courbes, le cheval cabré, devenant plus mince, à l'image d'un pur-sang d'exception.

Depuis la disparition du Commendatore, Luca di Montezemolo puis John Elkan et surtout Piedro Lardi Ferrari sont devenus les gardiens du temple. Ils sont juste revenus aux lignes courbes siglées en contrebas du fameux S F, comme un retour au source, tout en conservant l'image racé et sylphide du pur sang le plus reconnu au monde. Ayant en revanche pour des questions très pratiques retenu le logo rectangulaire pour les dernières clés sans contact (qui désormais très astucieusement et de manière parfaitement ajustée se logent en contrebas de la colonne centrale ... Même Porsche ou Bugatti, pourtant chantres de la qualité de finition, n'ont pas fait mieux !!)

En tout cas, c'est un symbole que tout tifosi ou non, humble amateur ou richissime propriétaires rêve ou est fier de porter.

Même un septuple champion du monde et plus que centenaire vainqueur de grand prix redevient un petit enfant devant une vitrine à (très) beau jouet lorsqu'il s'agit d'entrer dans la légendaire maison au Cheval cabré. Reste pour ce dernier à lui souhaiter au moins de monter sur la plus haute marche du podium (il l'a fait mais c'était juste une course sprint). Patience.

Mais c'est une autre histoire...ou du moins une poursuite de l'histoire.

Et rendez-vous justement à 15:00 à Imola à quelques encâblures de la maison.

Bon dimanche à toutes et tous.

* A rappeler que l'Italie était en guerre contre l'Allemagne lors de la première guerre Mondiale.

**A voir dernière image ci-contre du logo en question où apparaît bien le cheval cabré symbole de Stuttgart et qu'ironiquement les deux marques de voitures de sport les plus emblématiques partagent. Quelque part, pour revenir aux 24 heures du Mans, course parmi les courses, on peut dire que celle-ci a été remportée une trentaine de fois par un constructeur au cheval cabré = 19+11 ... Et ce n'est pas finie 🙂

*** Qui n'était qu'une nation-unie que d'à peine une soixantaine d'années, le royaume de Sicile et le dernier roi des Bourbons, le fameux ''guépard'' n'ayant rejoint la ''botte'' qu'en 60 (1860 s'entend)

**** ''En avant toute comme toujours !''